Tour du monde des écoles : la Nouvelle-Zélande

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L’archipel est l’un des plus lointains qui soit pour nous : la Nouvelle-Zélande, ou Aotearoa en maori, est peu peuplée (18 habitants au km2 en moyenne contre 100 hab/km2 en France, ou 33 hab/km2 pour le vaste territoire américain). Les paysages majestueux sont des plus dépaysants, et la courte histoire de ce pays nous est pour beaucoup complètement inconnue. Pourtant des familles françaises ont fait le choix de s’y installer, et les 5 familles que j’ai interrogées semblent d’ailleurs s’y plaire beaucoup. Leurs enfants sont scolarisés dans le système public ou privé national : voici leur expérience.


Le système scolaire est proche du système anglais et australien, mais quelles sont ses particularités ?

L’école néozélandaise est héritée de l’école britannique pour des raisons historiques, mais son développement quelque peu différent est là pour nous rappeler que le système ne fait pas l’école : c’est bien la culture, le milieu dans lequel évolue l’ensemble du corps éducatif qui détermine ce que l’école est. En Nouvelle-Zélande, la faible densité de population, l’influence de la culture maori donnent toute sa couleur à ce système scolaire insulaire. Ainsi, les écoles fréquentées par les enfants de nos Expats parents ne sont pas mixtes, et la plupart demandent le port de l’uniforme. Mais contrairement au système britannique, selon les écoles, l’uniforme peut être réduit à une écharpe, un sweat, ou au contraire être très strict. L’enseignement secondaire n’est pas organisé comme en Angleterre entre grammar school (sur sélection) et lycée général. Comme dans le pays de la Reine cependant, les horaires sont les mêmes pour toutes les classes, on déjeune son « packed lunch » et le professeur principal n’est pas celui d’une classe mais d’un groupe d’élèves répartis en plusieurs classes : ces « Form Class » sont quotidiennement regroupées pour suivre un tronc commun et partager la vie de classe. Cette organisation permet une plus grande variété de choix d’options. Au collège, on remercie les professeurs à la fin du cours.


Comment les enfants ont-ils été accueillis ?

La première année des tout-petits s’est rapidement mise en place pour toutes les familles concernées. Les mamans ont pris la peine de rester jouer sur la cour, ce qui a aidé à rassurer les enfants, et à les intégrer. L’investissement des parents dans la création des relations sociales est un facteur important de l’adaptation des enfants, quelque soit le pays d’accueil. Cependant, un des enfants dans une classe primaire en triple niveau ne regrette pas d’avoir quitté son école car il était « souvent perdu » dit sa maman.

Les élèves de primaire et de secondaire ont pu bénéficier de cours d’anglais quand cela s’est avéré nécessaire, et dans toutes les écoles concernées cela semble habituel de dispenser ces cours.

L’adaptation a été plus longue pour les plus grands, en particulier pour une élève qui est arrivée en classe de Première : il lui a fallu six mois pour se sentir à l’aise et se créer une vie sociale épanouissante pour une enfant de son âge. Il faut dire qu’à 16 ans, les parents ne peuvent guère intervenir pour aider à tisser des liens, et la socialisation – si importante à cet âge – devient la responsabilité de l’adolescent seul.


Quelle place occupe la culture maori dans l’école néo-zélandaise ?

La NZ compte trois langues officielles : l’anglais, le maori et la langue des signes. Au quotidien, il faut donc faire avec des termes maori qui ne peuvent être traduits, et qui véhiculent une vision de l’école dépaysante pour les francophones. Par exemple, une maîtresse écrit sur les cahiers en début d’année : « Nous aimons les TAMARIKI heureux, en bonne santé et actifs dans la classe n°4 . » Les TAMAKIRI, ce sont les enfants-élèves : pas de discrimination des deux rôles comme la langue française ou la langue anglaise par exemple la créent.

Certaines écoles primaires demandent aux enfants de se déchausser, dans la plupart des écoles, les parents rentrent dans la classe quotidiennement, on apprend des chants maori, etc.


Qu’est-ce qui dépayse le plus les familles françaises dans l’éducation en NZ ?

La sectorisation est très importante. Concrètement, elle augmente les écarts de niveaux et de budgets des écoles : chaque école a un « decile », c’est-à-dire un chiffre qui évalue le niveau socio-économique des élèves. Plus le « decile » est bas, plus l’école a de subventions. Moins l’école a de subventions, plus la part de donation des parents est importante. Un chiffre pour un lycée peu subventionné : minimum 500 € de donation pour un enfant, auxquels on ajoute les prix des sorties, le prix de l’uniforme, etc. D’où cette précision d’une maman : « c’est presque gratuit ».

Le travail numérique est plus important qu’en France : dès la sixième, une des familles a dû fournir un ordinateur à leur enfant pour qu’elle l’emporte tous les jours à l’école. Au lycée, l’ordinateur portable est obligatoire, et l’établissement est équipé d’un bon réseau Wifi. La vie scolaire fonctionne via une application sur mobile (en temps réel, les absences, retards, rappels de réunions, d’événements, bilan financier, etc.)

La qualité des équipements semble également avoir dépaysé certaines familles qui trouvent que leur établissement est mieux équipé que ce qu’elles ont connu en France.

Enfin, ce qui revient dans tous les témoignages comme étant un élément important de dépaysement : la relation de confiance avec le corps enseignant change la vie des familles. Le respect de l’enseignant ne passe pas par la distance, au contraire. Les enseignants et les parents font partie d’une même communauté, et les enseignants partagent leur vie privée avec les élèves et les parents comme on le fait entre collègues adultes. Les parents sentent les professeurs plus « motivés et à l’écoute », puisque la communication est plus directe – les professeurs donnent leur numéro personnel. (Rappelons cependant que la Nouvelle Zélande est peu peuplée, et que la qualité de vie est d’une manière générale beaucoup plus pacifique, « les gens sont plus cool, ils râlent peu ». Comparer la NZ à la France, c’est comme comparer un petit village de province avec Paris...) Une maman explique toutefois qu’ici, elle ne sent plus de « relation hiérarchique » entre elle et le corps enseignant. La confiance est donc mutuelle.

Cette confiance vient sans doute du fait que les parents sont très présents dans l’école et en assurent aussi un bon fonctionnement : l’école compte beaucoup sur eux pour animer des clubs, les fêtes, etc. Cela implique que de nombreuses mères travaillent à temps partiel, d’autant que les solutions de garde après l’école sont très réduites.

 

Comment se passe la fin des études secondaires ?

Les études secondaires se terminent par un équivalent du BAC français : cependant, il ne s’agit pas du même fonctionnement. On se rapproche davantage de celui du Brevet des collèges, puisqu’il est possible d’avoir son BAC avant d’avoir passé les épreuves. Le contrôle est « continu », mais toutes les notes ne comptent pas. Certaines notes (ou lettres) ne sont là que pour évaluer les chapitres, sans que cela ait d’incidence sur l’examen ou l’orientation : il s’agit d’une utilisation dite formative de l’évaluation (ces évaluations comptent au moins pour la moitié des notes au collège et lycée en France. On joue souvent avec les coefficients pour réduire leur impact dans la moyenne, puisque ces contrôles sont faits pour que l’élève sache se situer par rapport à ce qui devait être appris, et non pas pour déterminer un niveau final). Ce qui va permettre au lycéen d’avoir son bac, ce sont certains contrôles et des projets à réaliser au cours de l’année.


Comment les enfants vivent-ils leur scolarité en NZ ?

Une lycéenne écrit : « Pour la discipline déjà c'est hyper différent de la France parce que il n'y a aucune forme de punition (du genre heures de colle ou mots dans la carnet) du coup on a moins l'impression de travailler et de bien se comporter pour éviter la punition. Même les retards ne sont pas pénalisés sauf qu'ils empêchent de gagner des prix à la fin de l'année. On a le droit à nos téléphones dans la plupart des cours et on travaille beaucoup sur nos ordis. »

Les petits expats francophones se sentent bien dans leur école car ils se sentent en permanence encouragés. Un enfant a par exemple rapporté à sa mère les propos de sa maîtresse : « je préfère que tu utilises des mots compliqués et que tu fasses des fautes plutôt que tu ne les utilises pas de peur de faire une faute ». Les jeux de société sont très utilisés en classe, et de façon rituelle : une à deux fois par semaines dans certaines écoles primaires, au début de chaque journée pour une autre !


Quel est l’avis des parents ?

Les parents que j’ai interrogés sont très heureux de leur choix. Beaucoup regrettent que dans leur système d’origine, on « juge un peu trop vite » les élèves, qu’on leur « mette la pression ». L’école néozélandaise leur semble plus « inclusive » et elle s’attache d’après eux davantage à des « valeurs (gentillesse, confiance, succès, respect) ». Ils ressentent que les élèves ne sont pas comparés entre eux, et que la comparaison avec « ce qui est attendu pour leur âge » n’est pas systématique : deux à trois fois par an seulement. Le message de l’école leur convient : « Ils leur font prendre conscience que ce sont eux les maîtres de leur destin (...), ils ne forcent pas à apprendre mais essayent de motiver les élèves ». Les petits « apprennent beaucoup de choses, à leur rythme et selon leur curiosité, j’aime beaucoup cette façon de faire », témoigne une maman. « Ils valorisent beaucoup l’apprentissage par le jeu, plutôt que l’apprentissage académique ». Le pendant de cette méthode, reconnaît une maman, « c’est qu’on les habitue peu à l’échec » (mais ses enfants sont encore petits, elle sait que cela compte).

Une maman reconnaît aussi que la culture générale a moins sa place, mais elle relativise : « les connaissances, on peut les acquérir toute sa vie. L’important, c’est ce que font les parents et la cellule familiale en dehors de l’école. C’est vrai que ça dépend beaucoup du niveau socio-économique. » Mais pour cette maman, « aucune école ne peut réduire ces inégalités ». Ce débat est bien celui qui anime l’école française depuis la création du collège unique...


J’espère que cette petite visite de la Nouvelle-Zélande via la découverte de son système scolaire vous aura plu ! Je rappelle que cet article est rédigé à partir de témoignages, et que bien entendu, il est écrit pour rendre compte du regard de ces familles francophones expatriées qui ont gentiment accepté de partager leur expérience avec moi pour vous la faire partager à tous ! A bientôt pour une nouvelle destination !


Ecrit pour Expats Parents par Emilie Proust, professeur de français.
Son blog :
 https://madeleineetcupoftea.com/
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