Tour du monde des écoles : Australie

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Ah ! L’Australie ! Ses plages, ses surfers... et ses écoles ? L’époque de Hartley Cœurs à vif est bien loin, mais qui se souvient comme moi de Drazic et Anita sans nul doute s’imagine une école ensoleillée où les élèves sont « cools » et sportifs, s’épanouissent et s’expriment librement. Mais qu’en est-il vraiment ?

Notre tour du monde des écoles nous conduit loin, bien loin cette fois-ci ... Loin des clichés ?

Trois familles françaises ont joué le jeu du témoignage pour nous raconter leur expérience de francophones en ces terres insulaires.


Comment s’adapter à l’école australienne ?

Préparer la rentrée

Visiter l’école avant la rentrée (et jouer dans la cour), présenter l’expérience comme un jeu, conseiller d’observer et de faire comme les autres ont d’ailleurs permis de préparer psychologiquement les enfants. Résultat : l’adaptation s’est faite très vite.

Apprendre l’anglais

Les enfants non anglophones ont tous bénéficié d’une aide pour apprendre la langue et de se sentir bien dans leur nouvel environnement : une à deux heures par semaine avec une enseignante ou une assistante. Pour les plus grands (12 ans et plus), ils ont intégré un « Intensive English Center » et se sont retrouvés dans une classe composée à 80% d’enfants chinois et autres nationalités. Dans tous les cas, les familles se sont réjouies de voir combien les professeurs semblaient habitués à accueillir des élèves étrangers. Juliette (9 ans) a par exemple été autorisée à apporter sa tablette ou utiliser celle de l’enseignante pour chercher des traductions. L’enseignante a même décidé que tous les enfants allaient apprendre un peu de français, pour que Juliette se sente valorisée.

Se faire des amis

Tous les enfants se sont fait des amis assez facilement. Visiblement, les petits Australiens sont très « friendly »* : un peu trop d’ailleurs pour Juliette qui s’est sentie étouffée !


Quelles ont été les plus grandes difficultés des enfants ?

Seul un enfant a rencontré plus de difficultés d’adaptation : il est resté muet dans la classe pendant toute la première année. « La maîtresse a très bien géré » nous raconte sa maman. Jamais il n’a été reproché à l’enfant d’être mutique, on s’est juste assuré que les apprentissages étaient bien là, sans jamais mettre l’enfant en difficulté face à la classe.

L’école a également fait appel à un psychologue pour aider à gérer angoisse et timidité, mais celui-ci étant évidemment peu disponible (un psychologue pour 850 élèves), les parents ont fait le choix de consulter également à titre privé. Dès le premier jour de la rentrée suivante, le problème était réglé !


Qu’est-ce qui a le plus dépaysé les familles ?

Le système australien est proche du système anglais

L’école australienne présente de nombreuses similitudes avec l’école britannique dont nous avions parlé ici .

Parmi les similitudes :

-   Un uniforme : Les parents consultés admettent trouver l’uniforme parfois moche, mais très pratique ! et les enfants adorent se reconnaître comme membres d’une même école.

-   Un sac léger : Les fournitures sont fournies par l’école.

-  Pas de cantine : les élèves apportent leur « packed lunch »* ou achètent un encas dans un « tuck shop »* (souvent tenu par des parents bénévoles)

-   Pas de notes, ni de devoirs : L’évaluation se fait par compétences. A part quelques devoirs hebdomadaires en primaire, facultatifs pour les plus grands ou tout simplement ponctuels, il n’y a pas beaucoup de devoirs, ce qui permet aux enfants de bien profiter des activités extra-scolaires. Les enfants travaillent beaucoup sur tablettes, et les applications sont également disponibles à la maison pour qui veut s’en servir.

-   Une assembly* par semaine : à l’occasion de cette grand-messe, tous les élèves sont réunis pour applaudir les élèves qui se sont démarqués dans la semaine pour leur attitude, leurs progrès, leurs performances. Les parents consultés apprécient cette culture de la récompense : « tout le monde est bon à quelque chose et ils le font savoir : c’est ça, le système de récompense. D’une part on encourage les bons comportements, ou plutôt les comportements appropriés, et d’autre part, on remarque les efforts. Un élève mauvais qui devient médiocre va avoir une récompense parce qu’il a fait des efforts, qu’il a persévéré ». Par ailleurs, l’hymne national est chanté à chaque assembly.


Le calendrier et les horaires sont différents

L’année scolaire commence en janvier et finit en décembre. Les périodes de cours durent entre 8 et 10 semaines, et sont réparties de façon très régulière. Les vacances pendant l’année durent chacune deux semaines. Les « grandes vacances » durent quant à elles six semaines. L’année est organisée en « terms », au nombre de quatre.

L’école commence à 8h50 (avec une période tampon pour permettre aux retardataires de commencer le cours à l’heure) et finit à 15h tant pour les primaires que les collégiens/lycéens (le High School regroupe nos collégiens et lycéens, de la 4ème à la terminale), ce qui permet aux plus de 14 ans de prendre un petit boulot.

La journée en primaire peut être organisée de la manière suivante : 1h de cours, pause pour manger un fruit, 1h30 de cours, récréation d’une vingtaine de minutes, 1h30 de cours, 30 minutes pour le « snack », 1h30 de cours, 45 minutes pour le repas, puis 1h30 de cours.


Les écoles sont grandes

Il n’est pas rare de voir des écoles primaires compter 800 élèves en Australie. L’établissement est alors prévu pour un tel nombre d’élèves, et les infrastructures qui sont pensées à l’extérieur des établissements scolaires français la plupart du temps sont alors intégrés à l’école australienne : les élèves ont leur terrain de football, parfois même leur piscine !


Une évaluation continue, même pour l’orientation post-bac

Les élèves sont évalués une fois par trimestre avec un QCM ou un devoir rédigé (assessment) mais comme les évaluations sont préparées tout au long du trimestre, le jour J, le stress est réduit.

Les élèves du secondaire sont évalués de manière continue pour leur examen: c’est le nombre de points final qui va déterminer la possibilité ou non d’entrer dans le cursus choisi. Par exemple, il faut 99,5/100 pour entrer en médecine, quand un 50/100 suffira pour étudier la naturopathie. L’élève peut améliorer son « score » en rejoignant une autre matière la première année d’études supérieures. Il peut ensuite, grâce à des passerelles, rejoindre une filière plus sélective.


La posture de l’enseignant est différente

La disposition des classes est éclairante sur la posture que l’enseignant adopte, ainsi que le langage qu’il emploie pour commenter les efforts des élèves. Une maman a par exemple noté l’absence de bureau pour la maîtresse, et les tables toutes disposées en carré. Quant aux mots, ils sont dithyrambiques : « Ah ! Pénélope ! Impressionnant ! Elle est tellement calme, et posée, et réfléchie ! C’est génial de l’instruire ! ». Alors les enfants se sentent géniaux. La maman de Pénélope raconte : « Les enfants sont pris comme ils sont (remuants, rapides, lents, calmes, bavards ...) et les profs identifient ce qui va bien. En appuyant sur les qualités de chaque élève, ils les aident à développer encore plus leurs points forts. Et du coup, ce qui ne va pas, en comparaison, semble mineur. Ils cherchent à faire en sorte que les élèves deviennent les meilleures versions d’eux-mêmes. »

La notion de norme n’est pas du tout au cœur de l’enseignement, ce qui modifie en profondeur la posture de l’enseignant qui n’est plus là pour conduire les élèves à se rapprocher d’une norme mais pour aider l’élève à s’épanouir tant intellectuellement qu’émotionnellement.

Par ailleurs la langue anglaise est bien plus propice à la valorisation que la langue française : là où en français on dit « c’est très bien », en anglais, on dira « c’est brillant ».

Notons également en primaire l’éclatement des classes en groupes de compétences, dans lesquels l’élève n’est jamais enfermé : pour chaque discipline, le groupe est différent, et bien sûr, les élèves peuvent changer de groupe au gré des progrès de chacun. Ainsi, l’enseignant en charge de son groupe a bien cette posture de « coach » qu’un enseignant en classe entière, et face à un groupe très hétérogène, peine à adopter.


Les parents sont très impliqués

Les trois familles ont noté une très grande implication des parents dans le fonctionnement de l’école. J’ai tout de même posé la question qui fâche : ne s’agit-il que des mamans ? Eh bien pas du tout ! Vraisemblablement, les papas aussi interviennent (mais surtout pour le barbecue et les camps !). Parmi les événements organisés par les parents : journée du livre, défilé des bonnets de Pâques, journée des cheveux fous, stands pour les fêtes des mères/pères, journée orange (contre une cotisation pour acheter de nouveaux équipements)... Une maman a ainsi fait la lecture une fois par semaine dans la classe, et accompagné les enfants à la piscine.


Le thermomètre détermine les activités !

Les activités en extérieur sont bien plus développées en Australie car, bien entendu, le climat s’y prête. Pour autant, les températures pouvant monter très haut, les activités peuvent être annulées dès 38°C, et les élèves doivent alors rester en classe. Enfin... à 37°C, les élèves peuvent tout de même passer la journée dehors à faire du sport ! 


Le protocole est très important

L’école australienne est très protocolaire : pour chaque problème, un protocole à suivre. Toutes les familles n’ont pas vécu les choses de la même manière : visiblement, partout, en cas de retard ou d’absence, un message est envoyé sur le téléphone des parents. Cependant, en fonction des écoles, l ‘appel aux parents n’est pas aussi systématique. Une maman a constaté que l’école l’avait appelée à maintes reprises pour des « broutilles » qu’une autre école aurait gérées en interne. Cela lui a laissé le sentiment que l’école se déchargeait beaucoup sur les parents. Une autre maman considère quant à elle que le fait de prévenir beaucoup les parents les impliquait plus, et a surtout observé que c’était plutôt les cas graves qui étaient signalés.


Comment les parents accompagnent-ils la scolarité de leurs enfants dans ce système qui leur est étranger ?

Quand les enfants fréquentent un système scolaire qu’on n’a pas connu en tant qu’élève, on peut vite être déboussolé. Une maman reconnaît par exemple être un peu perdue quant aux disciplines étudiées. Ce qui rend les choses plus simples, c’est sans doute que l’autonomie des élèves est fortement encouragée, si bien que les parents n’ont pas vraiment à intervenir dans la scolarité.

L’absence des notes améliore-t-elle la relation avec les enfants ? « Pas vraiment, répond une maman. On obtient la même angoisse au moment de lire le bulletin et les notions non maîtrisées ».

Les bulletins de compétences comptent plusieurs pages, et les commentaires sont très développés.

La communication avec l’école se fait essentiellement par newsletters, et par mail pour le cas-par-cas.


Que pensent les familles de leur expérience ?

Sans surprise, les enfants ont aimé (ou aiment encore) leur expérience australienne. Il y a d’abord Anaïs et Romane qui sont depuis sept ans parfaitement habituées à ce système : il est devenu le leur, et comparer avec leur expérience française ne fait plus tant sens car revenir à « l’ancienne méthode » reviendrait à faire les mêmes efforts d’adaptation. Elles sont en situation de réussite, habituées à recevoir des récompenses pour leurs efforts, leur comportement, leurs progrès : elles aiment aussi ne pas avoir de devoirs.

Théo et Xana ont quitté le système australien et ont rejoint le système canadien. Ils étaient ravis de leur école australienne : ils aimaient la grande cour avec ses nombreux jeux (toboggans, pyramide en corde pour escalader, équipement sportif disponible à chaque récréation...) mais aussi les cours de dessin, la place de la lecture et les livres à rapporter à la maison.

Enfin, il y a Valentin, Pénélope et Juliette. Leur situation est particulière car après une expérience douloureuse dans le système scolaire français, ils ont été instruits en IEF (Instruction en famille). Le système australien semble leur convenir, à quelques détails près (le manque de culture générale, de débats, le manque de discipline de certains camarades). Les parents sont ravis que leurs enfants au profil atypique aient réussi à s’épanouir dans le système australien qui s’intéresse, nous explique la maman, davantage au développement des personnalités et des compétences qu’à l’acquisition de connaissances. Leur maman explique : « C’est plus important d’être résilient, persévérant (il s’agit des valeurs de l’école) et d’avoir l’esprit de groupe que de connaître la date d’arrivée de James Cook à Botany bay ».


Quant aux parents encore sur place, ils semblent sereins et confiants. Leurs enfants se projettent dans des études supérieures en Australie, mais les parents savent qu’en Australie, on peut changer de métier facilement. Ils apprécient de voir leurs enfants apprendre à travailler en équipe, à être ouverts sur d’autres cultures (le respect de la culture aborigène est très important à ce sujet). Ils estiment que leurs enfants sont encouragés comme il se doit et qu’ils se sentent valorisés. Enfin, l’inclusion des élèves présentant un handicap (comme l’autisme) est vécue comme une chance pour tous.


C’est la fin de notre excursion en Australie ! Nous n’avons pas été si dépaysés après notre passage en Angleterre, mais nous avons constaté que le même « système » s’exprime différemment selon la culture du pays. D’ailleurs nombreux sont les Anglais qui s’expatrient en Australie pour son exotisme. 


Petit lexique :
friendly : amicaux
tuck-shop : stand de nourriture
assembly : grande réunion de tous les membres d'une école


Ecrit pour Expats Parents par Emilie Proust, professeur de français.
Son blog :
 https://madeleineetcupoftea.com/
A lire, du même auteur : "Le blues de l'expat""Ceux qui sont restés""Super maman expat""Abécédaire des idées reçues sur l'expatriation""Tour du monde des écoles"" Expatriation à durée indéterminée", "Des Français à l'école britannique".