Le confinement, une opportunité pour apprendre autrement ?

#expatriation , #enfants , #ecole à la maison , #témoignage

J'ai envie de réagir aux nombreux posts que je vois passer ces derniers jours concernant l'instruction des enfants, dans lesquels transparaît la pression tout à fait compréhensible que ressentent les parents dans cette nouvelle situation si brutale et particulière. J'espère que mon témoignage pourra être utile.

L'instruction en famille, que nous pratiquons ici depuis 5 ans avec quatre enfants, m'a vraiment permis de prendre du recul et de déconstruire ce que nous avons tous appris à croire au sujet de la transmission et des apprentissages et qui conditionne nos attentes.

Les enfants apprennent tout le temps et surtout lorsqu'ils jouent ! Parce que pour apprendre, il faut être attentif et engagé activement. Et un des rôles du pédagogue, selon moi, est de leur apporter un espace de jeu, d'expérimentation, d'expression, de questionnement et d'échange propices à nourrir de façon ludique et plaisante leurs dispositions spontanées, leur curiosité naturelle, leur créativité, leur enthousiasme inné et leur soif d'apprendre.

Cette prise de conscience m'a permis de lâcher prise avec la croyance qu'un enfant qui a travaillé devant son bureau, fait ses exercices et appris ses leçons durant plusieurs heures a forcément appris plein de choses, qu'il a "bien" travaillé... Taratata !! Il n’a peut-être même rien retenu ! Tandis que s'il avait joué, il aurait tant appris ! Le jeu libre, dans lequel les enfants sont inventeurs, créateurs, acteurs, est le meilleur des professeur... Et lire, dessiner, discuter en famille, jouer de la musique, regarder des vidéos instructives… sont autant de façons d’acquérir des savoirs et de développer des compétences de vie (émotionnelles, perceptives, sociales et cognitives). Par ailleurs, détail d'une importance considérable selon moi, ces activités laissent une empreinte de joie, de plaisir, c’est un cercle vertueux !

Un de nos moments préférés par exemple, ce sont nos lectures quotidiennes, tous ensemble, sur une leçon, sur une poésie, une histoire... J'ai appris à me laisser porter, tout en gardant un cadre, au gré des questions et remarques des enfants. Et l'effet est magique ! Nous cherchons ensemble les réponses (dans des livres ou sur internet, tout est à portée de main maintenant), et au fil des découvertes nous voyageons parfois très loin, nous retrouvant à travailler sur les bactéries alors qu'on était parti de Louis XIV ! Et c'est merveilleux, car à chaque fois on a tous énormément appris, à tout âge, moi avec eux, et on a passé un tellement bon moment !

Et si les enfants s'ennuient !? La belle affaire ! Au contraire même ! Ces temps d'oisiveté et de respiration leur donnent l'occasion de se connecter à leurs besoins et d'exercer leur créativité, leur intelligence intuitive, de préserver leur regard d’enfant qui les rend si frais, si imaginatifs, si inventifs. Lâcher avec l'idée de vouloir remplir les journées des enfants avec 36000 activités, c'est à mon sens leur ouvrir le plus large espace possible, celui qui leur permettra, leur vie durant, d'être pleinement présents à eux-mêmes, de rester à l’écoute de leur cœur, de rêver librement leur vie, de se risquer à vivre leurs rêves, d’oser écrire leur propre voie… Celui qui ouvre, en définitive, le domaine des possibles…

Réfléchir à tout cela et l’expérimenter au quotidien m’a permis de me détendre, de passer des moments plus calmes, et donc beaucoup plus productifs. Car le stress est un antagoniste féroce de l'apprentissage et j'en ai fait ma sonnette d'alarme : il n’y a plus de plaisir ? il y a du stress ? hop, on arrête, ça ne sert à rien, on passe à autre chose, on y reviendra, autrement peut-être…

J’ai ainsi appris à lâcher prise, à ne pas nous mettre trop de pression, ni à moi, ni à eux, à faire confiance, à moi, à eux, à les écouter, à me mettre à leur hauteur, et à me laisser porter par leurs envie et leur merveilleux talents.

Finalement, revisiter mes croyances, et donc mes attentes, et faire confiance a été la meilleure stratégie pour tenir le coup dans cette expérience souvent difficile il faut l'avouer. Et j'en retire de tels apprentissages, une telle croissance personnelle et familiale et une telle satisfaction que je ne regrette rien. C’est une des plus belles expériences que je me suis offert de vivre. ❤️

Voilà, il me semble donc que si, durant cette période de confinement, les enfants font leurs devoirs scolaires durant 2h par jour, c'est déjà énoooooorme et largement suffisant, quelque soit la durée de ce confinement. Ils vont apprendre tellement d'autres choses, et vous aussi, j'en suis certaine ! Et puis vous n’êtes pas en instruction en famille, vous ne portez pas la lourde responsabilité de leur instruction. C’est simplement un passage et peut-être une opportunité extraordinaire qui vous est donnée, celle d'expérimenter quelque chose de nouveau, celle que les enfants apprennent autrement, durant ce temps hors du temps.

Je vous envoie plein de douceur et d'amour à toutes et à tous et vous souhaite le meilleur dans cette épreuve qui nous fera tous grandir.


Marion, de "L'Ancre et les Voiles" : https://www.lancreetlesvoiles.com/