Lorsque je suis devenue conjoint « suiveur », je ne réalisais pas ce qui allait réellement se passer au plus profond de moi.
J’y ai vu d’abord la possibilité de vivre autrement, une aventure familiale, une ouverture sur une autre culture et un changement permettant de sortir de la routine du « métro-boulot-dodo ».
Ce fameux sentiment de ne pas réussir à être équilibrée dans mes rôles de maman, épouse et travailleuse prenait de plus en plus de place dans mon quotidien.
Je me posais des questions sur le sens de cette course permanente pour réussir à tout mener de front, dans la bonne humeur.
Plus mes enfants grandissaient, plus je ressentais la rapidité avec laquelle ils allaient devenir autonomes et quitter la maison. Finalement cette proposition de vie à l’étranger pendant 3 ans venait à point nommé. J’allais pouvoir prendre du recul et profiter des enfants tout en réfléchissant à mon avenir (et oui, je pensais aussi à moi dans ce projet).
Une fois expatriée, j’ai rapidement eu un sentiment de manque … et pourtant, les enfants étaient bien, j’étais plus présente pour eux. Je tissais des liens sociaux très vite et la solidarité entre expats a été une découverte très chouette.
Ce sentiment est venu du manque de valorisation. Finalement je n’étais pas faite pour m’occuper de mon foyer et des enfants à plein temps. Il me manquait la valorisation que le travail m’apportait.
Cette valorisation que je tirais de mes réussites humaines et des projets développés n’était plus présente. L’exploitation de mes « capacités intellectuelles » à des fins professionnelles était en jachère…
Finalement j’ai réussi à dépasser ce sentiment par la prise de conscience que je devais arrêter de me penser mauvaise mère et de culpabiliser de ressentir ce besoin d’être valorisée par les projets que je développais hors foyer.
J’ai repris mes études et développé mon projet d’entreprise, tout en étant tout de même une maman attentive et épanouie.
Aujourd’hui j’accompagne des conjoints expatriés dans la construction de leurs projets professionnels, et je constate que le sentiment que j’ai vécu est partagé par beaucoup.
Les personnes que j’accompagne ont souvent ce point commun de « culpabiliser ». Penser à soi, avoir envie de se recentrer sur son projet alors que la vie ne nous y oblige pas directement, d’investir du temps et de l’argent dans une évolution de carrière ou une création d’entreprise au « détriment » de la famille amènent à ce ressenti.
Ils perdent souvent confiance en eux et ont des difficultés à faire passer leurs envies en priorité ou au moins leur accorder du temps.
Reprendre les rênes de leurs projets, qu’ils soient de se former, de travailler, de s’épanouir dans le bénévolat, de créer leur entreprise, leur procure une fierté et ils reprennent confiance en eux en redécouvrant les aptitudes qu’ils ont laissé en sommeil pour se donner entièrement dans leur vie de mère et épouse expatriée (ou père et époux expatrié !).
Leurs enfants et conjoints bénéficient bien souvent de ce nouvel équilibre et partagent la fierté.
Voici donc quelques conseils que je donnerai aux conjoints qui culpabilisent de ne pas se satisfaire uniquement de leur vie de parents/épou(x)se :
- Se libérer du temps pour soi, c’est savoir accorder du temps à ce qui nous motive et nous épanoui.
Le temps en expatriation est souvent différent du temps que nous avions en France. Il est moins séquencé, moins saucissonné par les activités quotidiennes (travail, foyer, activités de loisirs). Réussir à organiser ce temps est la clef pour faire progresser ses projets. Ainsi, généralement, les enfants finissent l’école plus tôt et il est difficile de s’organiser pour gérer la logistique familiale, les relations sociales (importantes en expat), les activités sportives ou créatives qui font du bien, et le développement de son projet sur des demi-journées.
La méthode la plus évidente est de reprendre la main sur votre planning, et de gérer votre agenda en y glissant une place régulière pour vos projets.
- Accepter de ne pas être parfait(e). Assumer que l’on n’est pas wonder-woman, que l’on n’est pas toujours heureux dans sa vie expatriée (même si l’entourage ne comprend pas toujours). S’accorder le droit de faire de son mieux est déjà un bon début. Voir le verre à moitié plein et valoriser les réussites et ce qui est bon chez soi permet aussi de mieux assumer le fait de ne pas être parfait.
- Garder le lien avec les anciens collègues et effectuer une veille sur le secteur d’activité que vous avez quitté. Ce maintien des relations vous permettra de garder vos références à jour sur votre métier et de ne pas vous sentir trop décalé(e). Vous perdrez moins en employabilité, ou vous aurez peut-être aussi conscience de ce que vous ne souhaitez plus vivre professionnellement, et vous aidera à réfléchir à un projet professionnel plus adapté à vos envies.
- Discuter avec votre conjoint de vos envies et doutes. Il ne peut pas imaginer ce que vous vivez à moins de l’avoir lui-même vécu. Exprimer vos doutes et peurs, savoir lui dire vos envies même si elles ne sont pas encore bien claires. La communication est importante entre vous, car vous vivez une situation qui vous change et fait évoluer les repères de chacun. L’impliquer dans votre projet afin d’avoir son soutien, vous permettra d’aller au bout de vos ambitions et limitera les incompréhensions.
- Refuser d’être aveugle. Autrement dit, ouvrir les yeux et faire le point sur ce qui vous équilibre ou non. Déterminer les choses à faire évoluer pour vous sentir mieux.
- Assumer vos envies et vous prendre en main pour faire avancer votre propre projet. Vous construisez votre place dans l’avenir, redonnez du sens à vos envies.
L’aventure de l’expatriation est une aventure qui vous change et ouvre des opportunités nouvelles, il ne faut pas négliger ses impacts sur les différents pôles de votre vie : personnelle et professionnelle. Prenez donc le temps de trouver votre place pour ne pas subir et redevenir pilote de votre avenir.
Article éctrit pour Expats Parents par Virginie Jocteur Monrozier
Accompagnatrice de carrière - Optimexpat