S’expatrier à 2h30 de son pays d’origine parfois peut sembler une bien mince affaire… Pourtant, pour certains adolescents la situation est vécue comme un déracinement.
L’adolescent qui arrive dans un pays qu’il ne connaît pas devra subir un processus d’assimilation culturelle et aura au début l’impression d’être ‘sur la touche’, et de faire un pas en arrière dans son développement. Ces perceptions devraient perdre de la force puis disparaître entre six mois et un an et demi, à mesure qu’il utilise ses contacts sociaux et s’imprègne du pays. Si ce n’est pas le cas, et que vous ressentez que votre enfant est peut-être en difficulté, discutez avec lui de la possibilité de consulter un thérapeute." .
Que l’adolescent soit ou non scolarisé dans un établissement francophone, créez autant que possible des opportunités d’apprendre par contact avec les médias nationaux et la population locale, et à faire de ce processus d’apprentissage un élément de votre vie familiale commune. L’adolescent cherchera activement à se développer une vie en dehors de sa famille, et vous devrez respecter ce souhait: nous vous conseillons donc d’offrir ces activités à votre enfant plutôt qu’à les imposer ! Rappelez-vous que vous aussi vous serez en phase d’apprentissage : vous pourrez faire de cette expatriation une opportunité de partage tout-à-fait unique.
En cas de déménagement international, un adolescent peut-il être déraciné de sa "tribu" son groupe de copains ou copines sans trop de difficulté d’adaptation ou de rejet de ses parents ? Comment en parler avec lui, lui en faire accepter l’idée ?
Il est essentiel et sain pour un adolescent de prendre ses distances par rapport à ses parents. Malheureusement un déplacement long à l’étranger va à l’encontre de cette tendance toute naturelle, puisqu’il va, en tout cas dans un premier temps, occasionner un resserrement des liens familiaux et entrainer une dépendance inopportune de l’adolescent à sa famille.
L’adolescent en ressentira bien sûr une forte contrariété, et il est très probable qu’il l’exprimera ouvertement. Il vous faudra être réceptifs et disponibles, et surmonter votre propre anxiété (forcément présente) pour lui donner la possibilité d’exprimer son mécontentement. Il vous faudra réagir avec amour et compassion tout en restant présents pour lui.
Les adolescents commencent juste à forger des amitiés dont l’horizon peut paraître infini et y apporter une fin brutale peut casser non seulement la relation mais aussi la sensation qu’ils sont maîtres de leurs relations. L’adolescent doit pouvoir développer un sens de la permanence de ses relations ; et c’est pourquoi il sera important de l’encourager à maintenir contact avec ses amis et sa tribu (s’il ne le fait pas naturellement, amenez le sujet en lui demandant des nouvelles de tel(le) ou tel(le) ami(e), et soyez attentif à ce qu’il vous répondra). Peut-être qu’à terme l’adolescent réduira son réseau à certaines amitiés essentielles, mais c’est un travail qui devra se faire de manière progressive et non pas d’un coup. Donnez-leur autant de visibilité que possible par rapport aux retours tels que les week-ends prolongés, les vacances etc.
Pour donner le maximum de chances à l’adolescent de garder un sentiment de maîtrise par rapport à ses relations, il faudra lui donner l’opportunité d’être proactif avec ses amis et de poser son départ en ses propres termes, plutôt que de se dire qu’il ne fait que suivre sa famille. C’est pour ça qu’il est vital d’aborder le sujet avec autant de préavis que possible et de discuter avec votre enfant non seulement de ses craintes et de ses attentes, mais aussi de la manière dont il va présenter son départ à ses amis.
Pour des enfants et adolescents qui doivent suivre leurs parents dans leurs mutations professionnelles plusieurs fois de suite, comment gérer au mieux les conséquences, c'est à dire l'absence de copains d'enfance, de domicile familial fixe ? Cela peut-il être préjudiciable à leur stabilité affective future ? Peuvent-ils manquer de repères ?
Nous vous déconseillons de soumettre un enfant – et surtout un adolescent –à des déplacements répétés. Le bouleversement causé par une ou à la limite deux longues expatriations (une pendant l’enfance et une pendant l’adolescence) et compensé dans la plupart des cas par le fait qu’il apporte une grande richesse à la personne, pourvu qu’il y ait assimilation de la culture locale. On parle d’ailleurs bien des « third culture kids », ces « citoyens du monde » dont les horizons culturels, les choix carrières et les intérêts sont plus vastes que ceux qui n’ont jamais effectué de déplacement long.
Mais les déplacements répétés mettront en danger la capacité de la personne à se créer des relations durables et qui constituent pour eux une source de stabilité. Et si les adolescents maintes fois déracinés sauront toujours « retomber sur leurs pattes » et se créer de nouvelles tribus, il leur manquera une profondeur de relation que seule le temps peut apporter.
Si il n’est pas en votre pouvoir de limiter le nombre de déplacements, il vous faudra être attentif au déroutement de votre enfant et accepter avec grâce ses reproches, qui seront justifiés. Reportez-vous à la question précédente en ce qui concerne le maintien du contact avec les pays que vous quittez.
Comment évoquer et faire comprendre à un enfant ou adolescent la notion de nationalité française et de repère historique, de traditions, de responsabilité civique quand on vit toute l'année à l'étranger ?
Il vous faudra maintenir un contact avec les médias français, et vous assurer que vous suivez les étapes clés telles que le recensement, l’inscription sur les listes électorales etc. Et continuez à cuisiner !
Entretien avec Cedric Bouet-Willaumez, psychothérapeute, pour "Avenue des Ecoles"
Publication d'origine : http://www.avenuedesecoles.com/index.php/tous-les-articles-sur-leducation-582/1538-entretien-comment...