Elise, 7 ans, expatriée.

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A l’heure où de nombreuses familles se préparent à quitter leur environnement, des habitudes et des amitiés patiemment construites, pour s’établir dans un ailleurs où tout reste à découvrir, le ballet des émotions est souvent mouvementé chez les enfants. Les parents, eux-mêmes malmenés par leurs propres sentiments ambivalents, pris par les préparatifs et organisation du départ, peuvent éprouver des difficultés à accompagner leur enfant, ne pas savoir comment l’aider à s’apaiser, et ressentir un sentiment de culpabilité parfois tenace.


Corinne Feuillet Luca et Virginie Houet, auteures du livre « Elise, 7 ans, Expatriée », expatriées en famille depuis de nombreuses années, ont vécu ces périodes de transition, accompagné leurs enfants dans leur joie comme dans leur tristesse. Elles se sont senties particulièrement démunies et impuissantes face au sentiment douloureux de manque ressenti par leurs enfants, le manque des amis laissés au grès des départs, celui de la famille vivant au loin, celui d’un être cher décédé… et se sont demandé comment les soulager.

« Elise, 7 ans, Expatriée » est né de cette quête, du constat que le manque, s’il engendrait des symptômes similaires à un deuil, était avant tout généré par une force positive, l’amour. C’est en prenant conscience de la beauté de cet amour, de son intensité et de son intemporalité, en comprenant qu’il est possible de l’intérioriser, de créer en soi une image mentale immuable, comme un jardin secret, que les enfants parviendront à y puiser force et réconfort.

Portés par des textes doux et poétiques, des illustrations tendres et colorées, nous entrons avec douceur dans l’univers d’Elise, une douceur non dénuée de souffrance puisqu’Elise est confrontée aux diverses émotions liées à l’expatriation et aux évènements douloureux de la vie.

Au fil des pages, nous accompagnons Elise dans sa joie de retrouver famille et amis, dans sa colère face à un départ imposé, dans sa tristesse devant la perte d’un être aimé. Avec elle, nous découvrons des stratégies permettant de dépasser cette souffrance, de vivre pleinement ces expériences émotionnelles pour en tirer une nouvelle force.


Nous y retrouvons trois thématiques qui sont des stratégies de bien-être appliquées à la vie réelle : la pleine conscience, la réparation et enfin la croissance de la sécurité intérieure.

La technique de la pleine conscience nous invite à accueillir et ressentir nos pensées et nos émotions. Il s’agit d’apprendre à ne pas lutter contre ce qui nous envahit mais de développer l’acceptation de ce qui est. Cela consiste à accueillir les pensées et les émotions qui surviennent dans l’instant, les observer avec curiosité et intérêt, les reconnaître et les accepter, enfin s’ouvrir à soi avec bienveillance et compassion. Une émotion qu’elle soit agréable (joie, gratitude) ou moins confortable (tristesse, malaise, perte, anxiété…) a besoin d’être exprimée et acceptée. Et finalement elle finit par passer et laisser la place à une autre d’une autre tonalité. Accepter de ressentir des émotions tant joyeuses que tristes, leur laisser à chacune leur place dans sa vie, permet de se sentir vivant émotionnellement.

La réparation : Elise, malgré le chagrin, la tristesse et la douleur de quitter, a trouvé des stratégies pour réparer ce manque des personnes auxquelles elle est attachée. La relation aux autres via des échanges concrets (lettres, dessins, appels) lui permet de continuer à investir des relations vivantes avec les êtres aimés mais éloignés. Une autre stratégie, plus élaborée, lui offre la possibilité de poursuivre un lien affectif et mental avec des personnes privilégiées, celles qui sont loin ou définitivement parties. En effet, guidée par sa mère, elle se créé son petit monde à elle, cet espace des possibles où elle peut faire vivre les images mentales des personnes qui lui sont chères. Il lui suffit alors de se mettre au calme, de rentrer dans son intériorité, son imagination, et de penser avec douceur à tout ce que les personnes qui comptent pour elle sont et lui ont donné. Se focaliser sur le beau et le bon, se connecter avec les sentiments et émotions agréables alors éprouvées en leur présence est un réel acte réparateur, un pansement mis sur la blessure du manque. Au niveau cognitif, faire appel à des représentations agréables, crée physiologiquement une petite décharge d’hormones du bien-être (dopamine, ocytocine) et l’impression de se sentir mieux est réelle. Elise comprend ainsi qu’elle est capable de s’auto-réconforter grâce à la présence symbolique des êtres aimés. Elle le fait d’elle-même quand ça ne va pas, puisant alors en ses propres ressources mentales. Elle développe sa résilience, sa capacité à faire face à l’adversité, qui l’accompagnera pour le reste de sa vie.

La sécurité intérieure : Par cette stratégie de réparation, qu’elle soit concrète ou mentale, Elise fait vivre en elle tout un petit monde, celui qui compte pour elle et fait sens. Plus elle grandit, plus cette communauté va s’élargir et s’enrichir. C’est une enfant qui a la chance de nous dévoiler des liens d’attachement sécures. Si elle souffre autant de l’absence physique de ces personnes aimées c’est justement parce qu’elle a eu des relations avec des figures bienveillantes et congruentes, disponibles et aimantes. Les liens tissés empreints d’amour et d’amitié créent des attachements solides qui nourrissent une certaine sécurité intérieure et facilitent l’usage de stratégies de régulation émotionnelles constructives. A la fin de l’histoire, tout en acceptant d’être vulnérable au manque, elle parvient aussi à ne pas se laisser déborder par l’angoisse du vide et gère le stress venant de la situation de séparation. Sa solidité intérieure en construction s’auto-nourrit et de ces liens d’attachement sécures puis de sa capacité à y faire appel en pensée. Même les enfants qui ont des liens d’attachement plus complexes (évitants, ambivalents ou désorganisés) trouvent toujours des liens d’amour dans lesquels puiser.

En enrichissant son jardin secret au grès des évènements et des rencontres, Elise grandit, se construit, se renforce, se crée un refuge rassurant où puiser l’énergie et l’envie de découvrir le monde, de croquer la vie. Se faisant, elle construit également sa propre identité, prête à accueillir ce que le monde a à lui offrir, elle, petite « française, expatriée et citoyenne du monde ».


Au-delà de l’histoire d’une petite fille expatriée, « Elise, 7 ans, Expatriée », nous offre un regard bienveillant sur des émotions d’enfance, universelles. Le jeune lecteur y trouvera des pistes pour avancer, chercher des ressources en soi, dépasser les périodes plus sombres et en sortir grandi, s’appuyer sur ces expériences pour se construire et aborder l’avenir et ses milles découvertes avec plus de sérénité. Un livre profond tout en sensibilité et légèreté, un baume doux et apaisant pour alléger et ouvrir le cœur de nos petits expatriés.

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Merci aux auteures, Virginie Houet, journaliste indépendante, spécialisée dans les domaines de l’expatriation et de la défense des droits humains et Corinne Feuillet Luca, diplômée de l’Ecole Supérieure des Arts Appliqués, graphiste-illustratrice et globe-trotteuse, pour leur confiance.

« Elise, 7 ans, Expatriée » aux Editions Amalthée, livre bilingue français, anglais.
Disponible dans le monde entier sur Bookwitty (livrable sans taxes ni frais de port)
La page Facebook du livre

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Article rédigé pour Expats Parents par Marie-Laure Giroud Coustier et Adélaïde Russell, psychologues